Ozi, la voix de la forêt : un plaidoyer animé pour la planète
Qui est Tim Harper : un technicien de l’animation devenu conteur engagé
Encore peu connu du grand public, Tim Harper fait partie de ces cinéastes issus de l’univers technique de l’animation, ayant forgé leur œil au sein d’équipes artistiques avant de passer à la réalisation. Animateur de formation, il a notamment signé la co-réalisation du film Pulp (2013) et a contribué à plusieurs séries et projets numériques avant de diriger Ozi, la voix de la forêt — son premier long-métrage d’animation en tant que réalisateur principal, produit en partie par le studio GCI Film.
Avec ce film, Harper s’inscrit dans une lignée de créateurs qui utilisent l’animation comme outil de sensibilisation. Plutôt que de masquer les enjeux derrière des effets comiques ou des récits parallèles, il choisit une narration frontale, parfois militante, mais toujours pensée pour être accessible à un jeune public sans tomber dans la démonstration pesante.
Une fable écologique à hauteur d’enfant
Ozi raconte l’histoire d’une jeune femelle orang-outan, arrachée à sa forêt natale de Bornéo par les ravages de la déforestation industrielle. Emportée dans un monde qu’elle ne comprend pas, elle en devient le témoin direct et muet. Le film n’échappe pas à une structure narrative classique — séparation, péril, retour — mais ce canevas sert ici une intention claire : donner à voir ce que le progrès détruit, avec une lenteur assumée et une certaine austérité.
Le scénario a été coécrit par Ricky Roxburgh (Tangled: The Series) et Keith Chapman (Paw Patrol), ce qui explique une certaine lisibilité enfantine. Mais le ton est plus grave qu’on ne l’attendrait d’un film orienté jeunesse. Le propos ne s’embarrasse pas d’ironie : il regarde la crise écologique droit dans les yeux, à hauteur d’animal.
Des voix au service d’un propos
Le casting vocal réunit plusieurs noms solides : Djimon Hounsou, Laura Dern, et RuPaul Charles entre aLe casting vocal rassemble plusieurs noms de premier plan. Amandla Stenberg, dans le rôle d’Ozi, incarne avec délicatesse une émotion sans emphase. Son jeu vocal rend la peur, la curiosité et la colère avec une grande retenue, renforçant la sincérité du personnage.
Laura Dern, qui prête sa voix à la mère d’Ozi, apporte une chaleur enveloppante au début du film, avant que le récit ne bascule. Djimon Hounsou incarne le père avec une intensité dramatique, tandis que RuPaul Charles, dans un contre-emploi étonnant, prête sa voix à Gurd, un crocodile albinos à la fois exubérant et empathique, qui agit comme un éclat d’humour dans une fable autrement sérieuse.
Un style visuel affirmé
Graphiquement, le film ne cherche pas la surenchère technologique. Le choix d’une 3D aux textures légèrement pastel, aux contours adoucis, rappelle davantage certaines productions européennes que les blockbusters américains. Les décors de jungle sont minutieusement travaillés, avec une palette chromatique évolutive, symbolisant la transformation du monde naturel en terrain dévasté.
Il faut noter également un travail soigné sur l’animation comportementale, notamment des animaux : les gestes, les postures, les regards — tout est empreint d’un réalisme émotionnel discret qui pousse le spectateur à l’empathie.
Ce qu’on emporte en sortant de la salle
Ozi, la voix de la forêt ne cherche pas à séduire par l’esbroufe. C’est un film qui choisit la gravité douce plutôt que le choc, et l’introspection plutôt que l’exaltation. Son ambition n’est pas de bouleverser mais de faire comprendre, de manière sensible, ce qui se joue à chaque arbre coupé, à chaque forêt brûlée.
On pense inévitablement à Miyazaki, à Princesse Mononoké, ou encore à Brendan et le Secret de Kells, dans cette capacité à lier récit écologique et univers poétique.